Le logement neuf est frappé par une crise sévère. Tel est le constat du pôle habitat de la Fédération française du bâtiment (FFB). Face à la gravité de la situation, les professionnels de l’habitat appellent à l’instauration d’un « bouclier logement » pour les ménages. Explications. Les professionnels de l’habitat tirent la sonnette d’alarme à propos du marché du logement neuf en France. Et pour cause, les chiffres présentés ce jeudi 23 février par le pôle habitat de la Fédération française du bâtiment (FFB), soit la première organisation représentative de la construction immobilière privée en France, sont préoccupants, voire « mauvais », alerte son président Grégory Monod. Aucune région n’est épargnée Le marché de la maison individuelle en “secteur diffus” (hors lotissement, donc en zone rurale par exemple) a subi une chute très violente en 2022, avec “des ventes s’écroulant de 31,3% sur un an”, annonce la FBF dans son communiqué. Soit “une dégradation jamais observée auparavant chez les constructeurs, même suite à la crise du subprime de 2008”. Cette chute fait pourtant suite à un rebond des ventes de 22,1% en 2021, en raison notamment des conditions de crédit très favorables et du dynamisme de l’offre bancaire. Mais les conditions très favorables de l’année 2021 ne sont plus à l’ordre du jour. Et lorsque l’on regarde de près les chiffres du dernier trimestre de l’année 2022, c’est encore pire : -38,2% de ventes sur ce même “secteur diffus”, selon le pôle habitat. Ainsi, avec un total de 96 000 ventes brutes comptabilisées sur l’année, il s’agit du “pire exercice des 16 dernières années”, déplore la FBF. D’ailleurs, l’effondrement des ventes à l’échelle nationale s’est observé “dans toutes les régions, sans exception”, affirme-t-elle encore. Seules les régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Corse connaissent une chute des ventes inférieure à 20%. Des prix des matériaux et des taux d’intérêts qui flambent Le bilan n’est pas plus reluisant du côté des “logements neufs en individuel groupé”, c’est-à-dire les maisons en lotissement. Alors qu’elles avaient augmenté de 10,5% en 2021, elles ont subi une violente rechute en 2022 : -22,2% sur un an, et même -37% de ventes sur le dernier trimestre de l’année. Au total, avec 6 100 ventes sur l’année 2022, l’habitat individuel groupé connaît son pire millésime des vingt-deux dernières années. Les ventes d’appartements en immeubles neufs sauvent-elles la donne ? Pas vraiment : “Quant au logement collectif, les ventes aux particuliers se contractent de 14,1% sur 2022 et même de 30,4% au dernier trimestre (en glissement annuel)”, explique le pôle habitat de la FBF. L’organisme explique ces chiffres en évoquant plusieurs aspects, notamment la flambée des coûts de construction, due à l’explosion des prix des matériaux (acier, bois, aluminium, produits PVC, tuiles, menuiseries, carrelage…). S’ajoute à cela la hausse brutale des taux d’intérêts (2,59% en moyenne début 2023, contre 1,07% un an plus tôt), ainsi que la réticence des établissements de crédit à accorder des prêts (- 19,6% en janvier 2023 par rapport à janvier 2022). Sans compter des ménages qui font preuve de prudence au moment d’acheter, à l’heure où de nombreuses incertitudes pèsent sur leur pouvoir d’achat, en raison du contexte inflationniste qui les empêche d’acheter leur résidence principale, ou les pousse davantage à épargner plutôt qu’à investir dans l’immobilier. Autant d’ingrédients qui expliquent la situation de crise que traverse le marché du logement neuf aujourd’hui. L’instauration d’un bouclier logement pour protéger les ménages Alors que la maison brûle, le Pôle Habitat FFB appelle à un “sursaut” car “le temps presse”. Ce sursaut ne peut avoir lieu qu’à trois conditions. D’une part, “que les établissements de crédit se remobilisent autour de la production de prêts immobiliers pour les particuliers”, énonce le communiqué. D’autre part, qu’il y ait “plus de transparence, plus d’anticipation et plus de tempérance dans l’évolution des prix des matériaux de construction”. Et enfin, que le gouvernement instaure un “bouclier logement” pour les ménages, à l’instar de celui mis en place sur la fourniture en énergie. Ce concept de “bouclier logement” repose selon cette fédération sur “cinq piliers”, à savoir “la prolongation du prêt à taux zéro (PTZ)” jusqu’à la fin 2024, “son rétablissement à 40% sans discrimination territoriale”, ainsi que le “rehaussement de 25% des plafonds d'opérations pris en compte pour son calcul”. Par ailleurs, selon le pôle habitat FBF, il est nécessaire d’instaurer un crédit d'impôt équivalent à 15% du montant à rembourser lors des 5 premières années de prêt immobilier, afin de “compenser l'impact” de la réglementation environnementale 2020. Et la fédération conclut en demandant la restauration du "Pinel”, dispositif d'incitation fiscal à investir dans l’immobilier locatif, “dans sa version 2022”.