Si la réforme de l’assurance chômage est engagée, elle semble souffrir d’un manque d’analyse préalable de l’impact des propositions émises par le candidat Emmanuel Macron. La part salariale de la cotisation a été transférée vers la CSG et la couverture a été étendue à quelque 25 000 démissionnaires et 30 000 indépendants depuis juillet. Mais pour plusieurs autres mesures, le flou demeure. Reprise des négociations avec les partenaires sociaux Important En juillet, l’Exécutif a proposé une reprise des négociations aux partenaires sociaux, alors qu’il avait jusque-là agi seul. Bien que ce changement de stratégie étonne, les observateurs y voient un moyen d’adapter l’existant aux nouvelles réalités et de renforcer la sécurité des travailleurs. Car les évolutions ont été nombreuses sur le marché ces dernières années. Outre les types de contrats classiques (CDI, CDD, intérim…), les statuts émergents doivent être intégrés dans l’assurance chômage (freelance, auto-entrepreneur, salariés de plateformes digitales de services…). Pour les experts, comme dans le système de protection sociale, il est indispensable de tenir compte de ces différentes formes d’emplois sans les opposer, car la standardisation n’est pas adaptée à cette complexité croissante. Plusieurs mesures annoncées, mais restées sans suite Important Le gouvernement a annoncé différentes mesures : instauration d’un système de bonus-malus pour pénaliser les employeurs qui abusent des CDD, prise en charge spécifique du chômage de longue durée et l’adoption de recettes fiscales à la place des exonérations de la part patronale des cotisations. La presse a également évoqué le plafonnement des indemnités chômage des cadres, qui peut atteindre 6 000 euros mensuels, couverts par l’assurance de prêt ou un contrat particulier. Pourtant, l’Unédic perçoit des sommes importantes sur les cotisations des cadres ayant une rémunération élevée. Pour encourager les salariés concernés à contribuer au système, le plafond ne doit pas être trop faible. Plus largement, les experts recommandent de garder l’affiliation obligatoire pour que perdure la solidarité interprofessionnelle et inter-catégorielle au sein du régime. Toutefois, des règles spécifiques doivent être fixées pour répondre à la fois aux exigences des adhérents et aux contraintes financières permettant de préserver le régime. Le Conseil d’État s’interroge notamment sur les risques liés à la création d’un système équitable couvrant aussi bien les salariés que les indépendants. Risque de basculement vers un système universel La logique assurantielle semble par ailleurs vouée à disparaître si les recettes fiscales viennent se substituer à la part des cotisations payées par les entreprises alors que le transfert des cotisations salariales vers la CSG a été effectué dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale de 2018. Important Le système d’assurance chômage en place pourrait alors se voir transformé en un système d’assistance minimum ou « universel » sur le modèle des Anglais. Or, une telle évolution entraînerait la libéralisation de la concurrence sur le secteur de la couverture chômage, favorisant les compagnies d’assurance. Le Conseil d’État d’ailleurs soulevé ce point dans son rapport concernant le projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel ». ImportantLe maintien des financements par cotisations patronales est par conséquent préconisé, de même que la prise en compte du salaire antérieur dans le calcul de l’indemnité versée aux salariés. Enfin, des solutions pertinentes doivent être trouvées pour financer la protection des travailleurs du numérique avec la valeur générée par l’économie collaborative.