Le « shutdown » qui a bloqué partiellement le gouvernement fédéral américain a duré 35 jours, un record, et coûté près de 11 milliards de dollars à l’économie, soit presque deux fois la somme réclamée par Donald Trump pour financer la construction d’un mur de séparation entre les États-Unis et le Mexique. Cet événement a permis de constater la fragilité de la situation de millions de ménages, y compris de la classe moyenne, du fait d’un endettement élevé. Près de la moitié des Américains n’ont pas les moyens de faire face aux imprévus L’économie des États-Unis n’est pas la seule à avoir souffert de cette paralysie. Quelque 800 000 employés fédéraux, placés au chômage technique ou contraints de travailler sans être payés, ont eu des problèmes pour faire face à leurs dépenses courantes (nourriture, carburant, téléphone, etc.) et à rembourser leurs prêts immobilier, étudiant... Le plus surprenant est que ces personnes bénéficient d’une situation professionnelle stable avec une rémunération correcte. Plus largement, le sondage annuel réalisé par la Fed concernant le « bien-être économique » montre que depuis 2013, le pourcentage de particuliers qui déclarent vivre confortablement ou avoir une situation correcte est en hausse de 10 points. Pourtant, 4 Américains sur 10 n’ont aucun filet de sécurité et aucun ne doit souscrire un crédit ou vendre un de leurs biens en cas de dépense imprévue (problème de santé, panne de voiture). Près de 80 % des travailleurs parviennent ainsi tout juste à boucler les fins de mois en attendant la paie suivante et seraient lourdement affectés par une éventuelle interruption de salaire. Même au sein de la classe moyenne, un peu moins de 30 % des personnes percevant un salaire annuel compris 50 000 et 100 000 dollars sont concernées. Le montant de la dette privée dépasse les 4 000 milliards de dollars Les récents événements, les appels à l’aide qui se sont multipliés sur les réseaux sociaux mettent en lumière les faiblesses d’une société dont la puissance repose sur la consommation et la dette. Des dizaines de millions d’Américains cumulent les crédits pour le logement, les études, les courses au quotidien, le transport. En excluant les prêts immobiliers, la dette privée des ménages a franchi le seuil des 4 000 milliards, selon les estimations de la Fed. Au deuxième trimestre 2018, la dette privée comprenait trois gros postes qui font redouter une bulle : 1 530 milliards de dette étudiante, 1 125 milliards de crédits auto et 1 037 milliards sur les cartes de crédit, ce dernier montant représentant une dette de 8 400 dollars en moyenne par foyer. Or, à l’inverse de la France, les États-Unis encouragent le crédit revolving et tout défaut de paiement entraîne l’application d’un taux d’intérêt punitif de 17,5 %, et le rachat de crédits pour rééquilibrer le budget familial n’est pas une démarche courante. Enfin, le taux d’épargne des ménages n’est que de 6,1 % (hors placements sur les fonds de pension), pour un montant médian disponible de seulement 4 830 dollars, pas assez pour faire face aux urgences comme le shutdown.