Devant le non-respect des doses prescrites par les médecins et les packagings, les patients accumulent des médicaments non consommés. Pourquoi ne pas passer à la vente de médicament à l’unité ? Les médecins prescripteurs n’en voient pas des inconvénients. Cependant, le débat est présent chez les producteurs, notamment les laboratoires de fabrication. En France, l’État envisage de passer d’une distribution de médicament en boîte cachetée à la vente à l’unité. Depuis la publication du décret en février 2022, les pharmaciens français s’apprêtent à franchir ce cap. Il s’agit surtout de ceux qui n’ont pas encore suivi cette nouvelle pratique de vente. Cependant, cette disposition n’est pas la bienvenue auprès des laboratoires qui ont un cahier des charges normé à respecter dans l’Union européenne. Pourtant, les autorités promouvant ce process de vente s’appuient sur des arguments anti-gaspillage, Ces dispositions auront pour but de ne pas laisser les patients livrés à eux-mêmes devant une panoplie de médicaments à leur disposition. La vente de médicament à l’unité vise à réduire le gaspillage Face aux innombrables comprimés, gélules et flacons entamés qui dorment dans les boîtes à pharmacie des particuliers, la politique de vente à l’unité survient. Cette accumulation est observée après la constatation que bon nombre de Français ont tendance à ne pas respecter les prescriptions. Seuls 40 % des recommandations médicales sont suivies par les patients, une fois à leur domicile. Ce gaspillage n’est pas sans conséquence sur le budgétaire, pour la chaîne de production et le réseau de distribution. C’est ce qui convainc certains professionnels à opter pour la vente à l’unité. À compter de février 2022, cette méthode de distribution a été appliquée dans le cadre des antibiothérapies. La question de sa généralisation auprès des 21 000 officines françaises se pose encore. Pour la bonne mise en application, le pharmacien Xavier Schneider strasbourgeois confirme : Nous délivrerons les médicaments à l'unité tout en suivant à distance la bonne prise du traitement. Cette distribution de médicaments à l’unité induit, cependant, des coûts à prendre en compte pour les laboratoires producteurs. Ces derniers doivent se munir de nouvelles machines à raison de 100 000 à 150 000 euros l’unité. La prescription médicamenteuse anti-gaspillage ne concerne pas uniquement le patient qui se soigne. Elle intervient également auprès de la mutuelle santé des particuliers qui prendra en charge les dépenses pour les soins médicaux. L’Union européenne réticente sur la vente à l’unité de médicaments Pour des soucis de traçabilité, les laboratoires qui fournissent des médicaments à l’échelle européenne ne peuvent pas se permettre de produire en vrac. Comme compromis, ces fabricants ont opté pour des conditionnements censés convenir à un traitement précis. Aussi, devant des cas avérés de gaspillage, ces établissements renvoient le tort aux prescripteurs. C’est ce qu’explique le directeur général de l'organisation professionnelle du secteur (Leem), Philippe Lamoureux : Nos conditionnements sont calibrés en fonction du traitement type inscrit dans les autorisations de mise sur le marché, donc le gaspillage vient aussi des prescriptions inappropriées. Philippe Lamoureux Ces propos sont infirmés par les médecins qui parlent de leur côté de prescription adaptée selon les patients. Ces professionnels prennent en compte le mode de vie du malade, son poids et les éventuelles interactions avec d’autres médicaments. Aussi, ni le packaging, ni la quantité de produit par paquet ne sont leur priorité. La mise sur le marché de médicaments à l’unité sur le sol français reste alors loin de la généralisation. Le contexte politique, la pénurie de médecins et les possibilités de prescription par les pharmaciens sont encore des motifs de ce retard. Cette façon de distribuer vulgarisée aux Etats-Unis reste encore optionnelle en Norvège, au Canada ou aux Pays-Bas. Dans la pratique, les laboratoires livrent les produits en gros. De leur côté, les pharmaciens les vendent en vrac, en prenant soin d’étiqueter les contenants individualisés.