Malgré tout son potentiel, l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi n’a pas donné les résultats escomptés. Ainsi, le constructeur français se trouvait déjà en difficulté bien avant la crise du Covid-19. Après le désastre du confinement, l’État a proposé une aide financière à ce protagoniste historique de l’écosystème français. L’industriel devra toutefois respecter certaines exigences pénalisantes en contrepartie. La pandémie de Covid-19 a gravement affecté tous les acteurs liés au secteur automobile, des constructeurs aux professionnels de l’assurance auto. L’exécutif a ainsi mis en place un plan de relance pour l’ensemble de la filière. Ce dispositif inclut notamment des fonds d’urgence pour soutenir les industriels et des aides à l’achat pour stimuler la reprise des ventes. Renault, pour sa part, devrait obtenir 5 milliards d’euros de prêt garanti sur 5 ans. À titre de comparaison, la France a débloqué 10 milliards d’euros par mois pour financer le chômage partiel durant le confinement. Pourtant, l’État exige l’irréalisable du constructeur en contrepartie, selon les spécialistes. Des conditions inconcevables Les exigences de l’État concernent la stratégie de Renault sur trois plans : technologique, en faisant de l’électrique une priorité absolue ; géographique, à travers la relocalisation des chaînes de production en France ; sociale, en préservant les emplois sur les différents sites répartis dans l’Hexagone. En priorisant l’électrique, Renault devra se délester d’une part importante de ses outils de production actuels. Par ailleurs, le savoir-faire de ses salariés sur la technologie thermique deviendra inutile sur une grande partie des process. Ce basculement aura nécessairement un coût en termes de ressources matérielles et humaines. Or, le licenciement est hors de question en tenant compte de la troisième condition imposée par l’État. À ce stade, le constructeur se retrouve déjà face à un dilemme insoluble. Comme en témoigne le volume de ventes, les voitures électriques ne sont pas très prisées des Français. Les mesures incitatives actuelles pourraient modifier légèrement cette situation. Toutefois, le développement de ce marché se fera au détriment des autres segments plus intéressants pour le constructeur et les caisses de l’État. En effet, les électriques impliquent des subventions et non des impôts comme les thermiques. Les spécialistes sont également dubitatifs concernant l’idée de relocaliser la production dans l’Hexagone. En effet, l’écosystème français est assez défavorable aux industriels. Au-delà des charges, les réglementations sont plus contraignantes et l’opinion sur l’industrie est souvent négative dans le pays. De plus, la Chine reste incontournable pour les batteries des 100 % électriques. Cet élément représente pourtant un tiers de l’ensemble du véhicule en termes de valeur. Ni les Français ni les Européens ne sont capables de fabriquer ces composantes pour l’instant, compromettant ainsi l’idée de relocalisation. Une décision incompréhensible En 2010, le dirigeant de Renault de l’époque, Carlos Ghosn, s’est montré particulièrement confiant dans le développement de l’électrique et l’avenir du constructeur sur ce segment. Il a d’ailleurs partagé cet enthousiasme avec la presse. Selon l’homme d’affaires : En 2020, la voiture électrique assurera 10 % du marché mondial ; et 20 % des ventes du groupe. 9 années plus tard, les électriques détenaient tout au plus 1 % de parts de marché à l’échelle mondiale. Par ailleurs, elles ne représentaient que 1,6 % des ventes totales du groupe. Renault n’a donc même pas atteint le dixième de ses objectifs en une décennie. Récemment, l’exécutif a annoncé l’accélération du basculement du constructeur vers l’électrique avec de grandes ambitions correspondant à ses projets pour cette technologie. Cette transition énergétique forcée s’inscrit dans le cadre de la stratégie mise en place pour surmonter la crise actuelle. Comme l’a annoncé le président de la République : En 2025, la voiture électrique assurera 50 % des ventes de Renault. Suite à cette déclaration, les spécialistes ne cachent pas leur scepticisme, vu l’échec mémorable de Carlos Ghosn dans cette démarche. Le régime actuel veut pourtant faire passer les parts de marché de l’électrique du fabricant de moins de 2 % à 50 % en seulement 5 ans. Même en faisant abstraction des problèmes logistiques engendrés par cette décision, l’État incite Renault à tout miser sur des voitures qui lui coûtent très cher (primes, bonus, etc.) par rapport aux thermiques. Or, l’électrique peut être supplantée du jour au lendemain par une autre technologie comme l’hydrogène.