Les médecins s’inquiètent des décès à domicile non comptabilisés dans les statistiques du Covid-19

Écrit par La rédaction Meilleurtaux . Mis à jour le 10 juin 2020 .
Temps de lecture : 4 min

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Publié le mardi 9 juin 2020 09:11 par la Rédaction Meilleurtaux

Le nombre de morts de l’épidémie de coronavirus communiqué chaque jour ne tient pas compte des décès hors institutions (hôpitaux, cliniques, EHPAD, etc.). Le syndicat de médecins généralistes MG France estime ainsi que le Covid-19 a fait près de 9 000 victimes non recensées dans tout l’Hexagone. Ces personnes sont le plus souvent décédées dans leur domicile.

Les problèmes sanitaires de grande envergure entraînent souvent une sous-évaluation du nombre de décès, en raison du caractère urgent et exceptionnel de la situation. En général, il faut attendre la fin de la crise avant d’obtenir des chiffres reflétant la réalité. Ainsi, les analystes auront besoin d’effectuer des études poussées pour pouvoir présenter des statistiques fiables sur les victimes la pandémie de Covid-19.

Par exemple, les médecins et les professionnels de la mutuelle santé ont dû patienter quatre ans avant d’avoir accès aux chiffres définitifs sur les décès liés à la canicule de 2003. L’INSERM a en effet arrêté le nombre de victimes à 19 490 seulement en 2007.

Hausse inquiétante du nombre de décès à domicile

En pleine crise sanitaire, les pouvoirs publics ne sont pas en mesure de quantifier le nombre de personnes mortes du Covid-19 chez elles. Ces informations ne sont donc pas transmises par les autorités sanitaires, en dépit de leur caractère essentiel. Pourtant, elles peuvent permettre d’appréhender la gravité de l’épidémie dans le pays.

Selon Jacques Battistoni, président de MG France :

Il faudrait demander à chaque médecin généraliste de faire un recueil et de le renvoyer au ministère de la Santé. Cela n’a pas été organisé. Je pense que dans les autres pays d’Europe, c’est la même chose, on ne mesure pas de façon fine les patients décédés en ville.

Jacques Battistoni.

D’après l’Insee, 59 % des décès recensés en France chaque année surviennent dans des établissements de santé (hôpitaux ou cliniques), 26 % à domicile et 14 % dans des maisons de retraite.

Sur les 57 440 morts (toutes causes confondues) enregistrées en mars dernier, près de 13 000 se sont produites à domicile. Ce nombre a progressé d’environ 10 % par rapport à la même période de l’année en 2019. Toutefois, l’Insee n’a pas fourni de précision concernant les causes de ces décès. Les médecins généralistes ont donc des difficultés à évaluer le nombre de victimes du coronavirus en ville.

Cette tendance à la hausse également été constatée par la fédération SOS Médecins. En effet, l’augmentation des décès à domicile en ville a atteint 54 % du 22 mars au 5 avril 2020, avec 253 morts en tout.

Estimations assez proches de la réalité

Outre les patients non admis à l’hôpital, les statistiques quotidiennes publiées par le directeur de la Santé ne tiennent pas compte des personnes souffrant de Covid-19, mais non testées. Cette situation permet ainsi de comprendre les chiffres avancés par MG France sur le nombre de décès non recensés durant la pandémie.

La médecine de ville ne dispose pas de tests adaptés au nouveau coronavirus. De ce fait, il était impossible d’obtenir des données précises et vérifiables sur les victimes hors institution. Le syndicat s’est néanmoins appuyé sur une enquête réalisée auprès des généralistes travaillant sur tout le territoire.

Comme l’explique Jacques Battistoni, sur Franceinfo :

Nous avons eu […] 2 339 réponses exactement. Ces médecins, on leur a demandé combien ils avaient vu de patients et on leur a demandé aussi combien, dans leur patientèle, de personnes à domicile étaient décédées du Covid-19.

Jacques Battistoni.

MG France a ensuite effectué une extrapolation pour chaque département en se basant sur ces réponses et le pourcentage de praticiens dans la zone géographique considérée. D’après le président du syndicat, les résultats obtenus sont relativement comparables aux nombres de victimes du coronavirus dans les hôpitaux et les EHPAD.

Cependant, il s’agit essentiellement de cas suspects pour l’instant. Ces chiffres nécessiteront donc des vérifications supplémentaires sur le moyen terme. Les médecins devront par ailleurs affiner leurs évaluations en comparant le taux de mortalité en ville pour cette année par rapport à celui de 2019.