Selon Frédéric Charbonnier, qui enseigne à Sciences Po Toulouse, le système de retraite actuel est antiredistributif. Les formules de protection collectives proposées dans l’Hexagone servent notamment ceux qui vivent si longtemps qu’ils ne peuvent plus pourvoir à leurs besoins. Comment expliquer cette situation qui porte préjudice aux plus pauvres ? En érigeant la réforme de retraite, les pouvoirs publics entendent maîtriser les dépenses pour les stabiliser à 14 % du PIB. Dans le détail, les points accumulés durant les années de travail sont indexés sur les salaires. Autrement, dans 30 ans, les charges pourraient diminuer, ce qui est susceptible de faire reculer de 15 % à peu près le niveau de vie des seniors. Les mutuelles ne compenseront pas forcément la différence. Mais pourquoi la réforme de la retraite fait-elle donc autant de bruits ? Le professeur Frédéric Charbonnier a répondu à cette question en évoquant les inégalités engendrées le déterminisme social. Des lacunes à combler avant d’aboutir à une protection à la carte Permettre aux travailleurs un départ à la retraite anticipé. Il s’agit de l’une des solutions déployées au cours de ces dernières années pour résoudre les inégalités liées à la durée de vie. Les personnes concernées ? Celles qui s’avèrent incapables d’exercer leur fonction après avoir contracté une maladie professionnelle. Il en est de même pour celles chez lesquelles la pénibilité des conditions de travail a été constatée. Le nouveau système (à points) veut que chaque retraité puisse bénéficier d’une couverture personnalisée en adéquation notamment avec les cotisations versées. Mais des efforts sont à fournir pour que l’assurance-retraite protège en cas d’arrêt de travail anticipé engendré par une pathologie réduisant l’espérance de vie. L’âge pivot est une autre mesure qui interpelle. Ce système n’est pas conforme aux objectifs de la protection à la carte. En effet, il lèse les salariés qui ne pourront pas travailler jusqu’à 64 ans. Des espérances de vie inégales en raison du déterminisme social et de la profession Selon Frédéric Charbonnier, si l’assurance-retraite actuelle favorise les inégalités, c’est parce que les cadres perçoivent leur pension plus longtemps que les ouvriers. La différence est encore plus importante lorsque la durée de vie « en bonne santé » passée la cinquantaine fait l’objet d’une comparaison. En effet, les plus aisés vivent 9 ans de plus. Tabagisme, sédentarité et surcharge pondérale sont les facteurs comportementaux qui sont à l’origine des écarts d’espérance de vie dans près de 25 % des cas. Cependant, les études relatent que toutes ces données sont influencées par l’hygiène de vie adoptée depuis l’enfance et les origines sociales. Comment la mise en place de principes de justice peut-elle changer la situation ? Parmi les solutions proposées par Frédéric Charbonnier figure la réalisation d’examens médicaux lors du départ à la retraite. Même si la pénibilité du travail, la durée de vie et la catégorie socioprofessionnelle sont fortement corrélées, les causes d’inégalités indirectement liées au travail seront écartées d’emblée.