Si la loi Lemoine a offert de la flexibilité aux emprunteurs, en leur permettant de résilier leur assurance de prêt à tout moment, certains établissements bancaires traîneraient un peu les pieds au moment de laisser partir leurs clients. Décryptage. À l’heure où l'inflation se maintient à un niveau plus élevé que prévu, à 6,3% en février sur un an, selon les chiffres définitifs dévoilés ce mercredi par l'Insee, le pouvoir d’achat des ménages est sous pression. Mais pour faire des économies, vous pouvez profiter depuis le 1er septembre dernier de la loi Lemoine, du nom de la députée Agir qui en est à l’initiative. Elle permet de changer d'assurance pour votre crédit immobilier à tout moment, peu importe sa date de signature, et non plus seulement à la date anniversaire de votre contrat. Pour rappel, au 1er juin, seuls les nouveaux crédits immobiliers étaient concernés par cette loi. Des banques aux abonnés absents pour répondre à leurs clients ? Si cette réforme peut vous permettre de réaliser « entre 15.000 à 20.000 euros sur toute la durée de vie du prêt », indique aux Echos le président d’April Éric Maumy ; le changement d’assurance emprunteur est toutefois soumis à une condition : que votre nouvelle assurance propose des garanties au moins équivalentes. Sur le papier, il s’agit d’une aubaine pour tous les emprunteurs, qui, peu importe leur âge et leur profession, peuvent mettre fin à leur contrat. La loi accorde un délai de 10 jours à la banque pour répondre à une demande de changement d’assurance. Un délai « globalement respecté » selon la députée Patricia Lemoine, qui prétend que « même s'il y a encore des manquements, cela s'est clairement amélioré ». Pourtant, dans les faits, Éric Maumy explique que « les banques prennent de plus en plus de temps pour répondre. On avait un délai moyen de réponse de 26 jours en janvier, il passe à 28 jours en février ». Un avis partagé par l'Association pour la promotion de la concurrence en assurance des emprunteurs (Apcade), qui relevait par exemple fin février des délais pouvant aller « jusqu'à 40 jours pour les plus mauvais élèves », relève le site d’information MoneyVox. Un recul nécessaire pour tirer des enseignements Alors, certains établissements bancaires joueraient-ils vraiment la montre pour décourager les emprunteurs à changer d’assurance pour leur crédit immobilier ? Selon certaines sources citées par les Echos, ce serait par exemple le cas du Crédit Mutuel Alliance Fédérale. Contactée à ce propos par le média, la banque mutualiste explique avoir « pris l'ensemble des mesures opérationnelles nécessaires pour se conformer aux obligations réglementaires », et ainsi, « respecter ce délai [de 10 jours, NLDR] ». Des déclarations qui vont dans le sens des propos émis par la Fédération bancaire française (FBF) le 7 mars dernier : « nous n'avons pas connaissance de notre côté de dysfonctionnements », relatent Les Echos. Le lobby des banques se félicite également du succès de la loi Lemoine, qui “a apporté des modifications très importantes au fonctionnement de l'assurance emprunteur au moment de l'octroi du crédit avec la suppression du questionnaire médical, ou en cours de vie du contrat avec la possibilité de résiliation à tout moment”. Enfin, la FBF vante le « délai de mise en œuvre très court dans lequel les établissements de crédit ont effectué les évolutions opérationnelles nécessaires », souligne le quotidien économique. Il semble toutefois prématuré de tirer le bilan. La patience semble être de mise pour Patricia Lemoine : « l'année 2023 va nous permettre d'avoir du recul et de mieux jauger l'efficacité des dispositifs que l'on a voté et de mettre en lumière les éventuels effets de bord ». Elle promet également de corriger ces derniers « rapidement », souligne MoneyVox.