Pendant la trêve hivernale, comprise entre le 1er novembre et le 31 mars de l’année suivante, l’expulsion d’un locataire qui accumule les impayés de loyers est interdite. Depuis le 1er avril, les procédures d’expulsions peuvent reprendre. Dans un contexte social tendu, le sujet préoccupe bailleurs et locataires et mobilise les professionnels. Les impayés de loyer, un sujet qui touche un public très large Ces derniers mois, la question des impayés s’impose comme un enjeu majeur. Une étude de l’Union sociale pour l’habitat (USH) datant de décembre 2022 révèle qu’« environ 50 % des bailleurs sociaux déplorent une augmentation supérieure de 10 % du nombre de locataires de logements HLM accumulant au moins trois mois d’impayés ». Contrairement à une idée reçue, les propriétaires de leur résidence principale ne sont épargnés en raison de l’inflation galopante. Christophe Demerson le président de l’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI), déclare que « ces derniers sont nombreux à ne plus pouvoir s’acquitter de leurs charges ». Christophe Demerson Les seniors, notamment les veuves, en proie à de grosses difficultés économiques, n’ont souvent d’autre choix que de mettre leur bien en viager. Et ce n’est pas tout. Certains syndics relèvent des impayés dans les copropriétés. Les assureurs dénoncent une hausse du nombre de copropriétés qui ne parviennent plus à régler les primes d’assurance couvrant les parties communes. Face aux tensions sociales et à la poursuite de l’inflation, les associations de défense du droit au logement craignent une explosion des expulsions. En effet, la précarisation des ménages s’aggrave. Bailleurs et locataires : les précautions pour éviter les impayés de loyers Pour sécuriser le paiement des loyers, les bailleurs doivent prendre plusieurs précautions avant de signer le bail. Outre l’indispensable vérification des sources de revenus du candidat à la location, le propriétaire peut exiger une caution ou un dépôt de garantie. Une autre solution consiste à souscrire un contrat d’assurance pour se couvrir en cas d’impayés de loyers, surtout pour ceux qui comptent sur cet argent pour rembourser un crédit immobilier. Alternativement, si le locataire perçoit une aide au logement, l’Agence départementale d’information sur le logement (ADIL) rappelle que le bailleur peut faire jouer le principe du tiers payant. Concrètement, la Caisse d’allocations familiales (CAF) verse l’allocation directement au bailleur, qui la déduit du montant du loyer, diminuant le manque à gagner pour le propriétaire. Quant au locataire qui respecte les conditions d’âge et de revenus, il peut solliciter la garantie Visale ou la caution gratuite fournie par Action Logement. Le Fonds de solidarité logement (FSL) peut également venir en aide au locataire en grande difficulté. Enfin, les locataires doivent avoir le réflexe de solliciter les conseillers des organismes de prévention et de conseil, sans attendre que la situation devienne trop grave (réception d’une mise en demeure de paiement). Les étapes à suivre pour résoudre une situation d’impayé de loyer Dès le premier loyer d’impayé, le bailleur a intérêt à rappeler ses obligations au locataire et s’efforcer de parvenir à une solution amiable. D’après l’Adil, « un plan d’apurement de la dette locative, s’étalant sur quelques mois, préserve le droit à l’aide au logement du locataire ». Adil Important À défaut de trouver un accord amiable, le bailleur a la possibilité de saisir un conciliateur ou un médiateur. Dès les premières démarches judiciaires, les experts recommandent de se faire accompagner par un avocat afin de limiter la perte de temps et d’argent. Les suites d’une procédure judiciaire peuvent être très différentes : injonction de payer remise par un huissier ; mise en place d’une procédure de recouvrement (saisie sur les biens mobiliers, le salaire, le compte en banque…) ; résiliation du bail et expulsion du locataire, mais exclusivement après délivrance d’un titre exécutoire. L’expulsion est le dernier recours face à un mauvais payeur. Mais elle n’est pas systématique. D’ailleurs, depuis la crise sanitaire, elles ont fortement diminué. Selon les données du ministère du Logement, « 16 700 ont été exécutées sur décision de justice en 2019, avant de tomber à 8 000 en 2020, puis de remonter à 12 000 en 2021 ». Les chiffres pour 2022 ne sont pas encore connus. Ils pourraient être modérés, en raison de l’instruction donnée aux préfets de se montrer plus souples et de suspendre les expulsions en attendant une proposition de relogement ou de logement temporaire. Mais « la donne pourrait changer en 2023 », redoute la fondation Abbé Pierre, surtout en raison de la proposition de loi « Antisquat ». ImportantS’il est adopté, ce texte prévoit un durcissement des sanctions contre les squatteurs et une accélération des procédures à l’encontre des mauvais payeurs. D’ici là, le ministère du Logement planifie une réunion de tous les acteurs impliqués dans l’Observatoire national des impayés dans le courant du mois d’avril. A retenir Avec la fin de la trêve hivernale, les expulsions de locataires pour impayés de loyer sont autorisées depuis le 1er avril 2023. Les impayés concernent les locataires de logements privés et sociaux, les propriétaires de leur résidence principale pour les charges, et les copropriétés pour les assurances. Différentes solutions s’offrent aux bailleurs pour se prémunir des impayés, et aux locataires pour régler leur dette.