Alors que les impacts néfastes de la pollution atmosphérique sur la santé respiratoire et cardiovasculaire sont bien documentés, les scientifiques français de l’INSERM ont fait une découverte inattendue. Ils ont mis en évidence un lien entre la pollution atmosphérique et le vieillissement accéléré des yeux, en mettant en cause les fines particules émises par les véhicules thermiques. Leur étude révèle que l’exposition chronique à une forte concentration de polluants peut augmenter le risque de glaucome, qui est la deuxième cause mondiale de cécité. Une augmentation du risque de cécité Le processus de vieillissement oculaire implique principalement une dégénérescence progressive de la couche nerveuse de la rétine, entraînant une altération potentielle du champ de vision. C’est précisément ce mécanisme qui est identifié comme étant à l’origine du glaucome, une maladie neurodégénérative attaquant le nerf optique. Déjà conscients de la relation entre la pollution atmosphérique et certaines maladies neurodégénératives, les chercheurs sont partis du principe que l’œil, en particulier la rétine, représente une extension du système nerveux central, lié au cerveau. C’est ainsi qu’est née l’hypothèse selon laquelle la pollution peut également nuire à la santé oculaire, Explique Laure Gayraud, doctorante en épidémiologie et auteure principale de cette étude. Pour le confirmer, l’étude a été réalisée auprès de 683 personnes âgées de plus de 75 ans, habitant à Bordeaux entre 2009 et 2020. Des examens oculaires réguliers ont été effectués tous les deux ans pour observer l’évolution de l’épaisseur des fibres nerveuses de la rétine, permettant ainsi d’évaluer la vitesse du vieillissement oculaire. Simultanément, les chercheurs ont évalué l'exposition de ces participants à la pollution atmosphérique en mesurant la concentration de différents polluants de l’air dont ceux avec un diamètre inférieur à 2,5 μ, les « PM2,5 ». À noter que la mutuelle optique vous permet de bénéficier d’un remboursement optimal de vos soins ophtalmologiques. Réduire les seuils réglementaires européens ImportantLes résultats montrent que les personnes exposées à des niveaux élevés de polluants ont subi un amincissement accéléré de la couche de cellules nerveuses de leur rétine. Bien que le lien direct avec le glaucome ne soit pas étudié dans cette recherche, la doctorante précise que : Certains aspects de cette maladie pourraient être impliqués. Grâce à leur taille minuscule, les particules fines sont capables de s’introduire dans l’organisme et déclencher des réactions inflammatoires et un stress oxydatif dans le corps. Selon l’hypothèse de Laure Gayraud, ce mécanisme pourrait également être à l’œuvre au niveau de la rétine, où les particules fines pourraient franchir la barrière et provoquer la dégénérescence des cellules oculaires. Les résultats sont plus inquiétants encore, car les niveaux de particules fines étaient en moyenne en dessous des seuils réglementaires d'exposition annuelle de l'Union européenne qui fixe un maximum de 25 μg/m³ pour les PM2,5. Or, dans cette étude menée par la Dr Cécile Delcourt, directrice de recherche à l’INSERM, les mesures tournaient en moyenne autour de 20. Ces chiffres montrent que le risque pour les habitants des zones polluées est déjà conséquent, même en restant en deçà des normes actuelles. Face à cette réalité alarmante, les auteurs de l'étude insistent sur la nécessité de revoir les seuils réglementaires européens, en accord avec les recommandations de l'OMS, qui préconise une réduction de 5 μg/m³ pour les PM2,5. Bien que l’Union européenne ait déjà voté pour un abaissement à 10 microgrammes par mètre cube d’ici 2030, comme le mentionne le Dr Delcourt, ce processus prendra du temps et les actions individuelles restent malheureusement limitées. A retenir Une étude menée par les chercheurs de l’INSERM montre que les particules fines, particulièrement celles provenant du trafic routier, peuvent provoquer un vieillissement prématuré des yeux et, dans les cas les plus graves, être associées au développement du glaucome. Ces résultats soulèvent un appel pressant à la révision des normes de pollution afin de mieux protéger la santé visuelle de la population.