Au terme d’une rude bataille, les détenteurs d’une assurance de prêt pourront, à compter du 1er janvier prochain, changer de contrat chaque année. Les banques, qui risquent de perdre des revenus conséquents, n’entendent pas se laisser aisément prendre des parts sur un produit très lucratif. L’équilibre du marché menacé, selon les bancassureurs Les bancassureurs déplorent notamment l’effet rétroactif de la nouvelle mesure. Selon la directrice générale de la Fédération bancaire française (FBF), Marie-Anne Barbat-Layani, cette disposition bouleverse le système actuel des contrats de groupe, basé sur la mutualisation des risques et sur une couverture uniformisée entre tous les adhérents. La conséquence serait un déséquilibre global sur le marché français des crédits immobiliers, dynamique, accessible à la plupart des ménages grâce à des taux historiquement bas, et qui offre une grande sécurité, tant aux prêteurs qu’aux emprunteurs. Avec ce changement réglementaire, les emprunteurs présentant des profils plus risqués (seniors, revenus faibles, pas ou peu d’apport personnel, problème de santé, etc.) pourraient payer leur crédit beaucoup plus cher. La FBF et quelques grands groupes ont par conséquent saisi le Conseil d’État, qui a transmis le dossier au Conseil constitutionnel début octobre. Ce dernier devrait émettre son avis dans les trois mois. Un marché de 8,8 milliards d’euros en jeu Il est vrai que l’enjeu est de taille pour tous les acteurs du secteur. En 2016, d’après les statistiques de la Fédération française de l’assurance, l’assurance de prêt a généré 8,8 milliards d’euros, dont 75 % sont liés aux contrats de crédit immobilier. Sur ce produit, des données récentes estiment à 40 % le taux moyen de marge que les banques réalisent, voire 70 % sur les dossiers d’emprunteurs jeunes sans souci de santé. Important De plus, elles détiennent 88 % du marché. Or pour les emprunteurs, cette protection représente un coût important, alors que des offres individuelles moins onéreuses se multiplient. 2,8 milliards d’euros d’économies potentielles pour les emprunteurs Les lois Lagarde et Hamon, applicables depuis 2010 et 2014, permettent aux clients bancaires de souscrire une assurance plus avantageuse au moment de signer le contrat de prêt ou au cours de sa première année d’existence. Mais dans la pratique, peu de consommateurs recourent au dispositif, appelé « délégation d’assurance ». À partir du 1er janvier 2018, de nouvelles possibilités s’ouvrent à tous les emprunteurs immobiliers (anciens et nouveaux) avec l’amendement Bourquin. Désormais, le changement de contrat d’assurance est autorisé à chaque date anniversaire jusqu’à l’échéance du prêt, avec une économie potentielle annuelle de 500 et 700 euros à la clé. Important Au total, les Français pourraient réduire le coût de leur crédit logement de 2,8 milliards d’euros, soit environ 6 310 euros chacun. Mais pour les banques, là n’est pas le plus important. Elles brandissent la menace d’une exclusion des emprunteurs présentant un profil risqué et à terme, d’un dérèglement du marché, soutenant qu’elles offrent actuellement le meilleur service en matière d’assurance de prêt.