Malgré la succession des réformes concernant l’assurance emprunteur, le législateur peine à imposer la liberté de choix des consommateurs en la matière. Les banques multiplient les moyens pour s’attacher les clients jusqu’à l’échéance de leur crédit. Dernier texte en date, le projet de loi Sapin II veut accorder la faculté de résiliation annuelle aux emprunteurs, mais ouvre une brèche dont les banquiers ne manqueront pas de profiter. Motifs variés de refus de substitution d’assurance Un rapport de la direction de la Consommation du ministère des Finances datant de mars 2016 dresse un bilan sur le secteur de l’assurance de prêt immobilier. Le document recense tous les motifs invoqués par les banques pour refuser la délégation d’assurance, que ces moyens soient légaux ou illégaux, de bonne ou de mauvaise foi. Il faut savoir que dans un contexte de taux d’intérêt historiquement bas des crédits logement, les banquiers compensent largement leur manque à gagner sur l’assurance, un produit particulièrement lucratif. Impact encore faible de la loi Hamon L’enquête montre en outre la très faible progression de la souscription d’offres d’assurance alternatives aux contrats de groupe proposés par les banques. L’exercice est d’autant plus difficile que les établissements bancaires interrogés se sont montrés réticents à fournir des informations, ou prétendent ne pas avoir gardé trace des demandes et refus de substitution, ainsi que des causes opposées. En effet, les intentions de résiliation et de changement d’assurance de prêt immobilier sont « bloquées » directement par les agences et certains intermédiaires, qui dissuadent les emprunteurs, et empêchent la soumission d’une sollicitation officielle. L’impact de la loi Hamon, qui permet la substitution pendant la première année suivant la date de signature du prêt est donc moindre, d’autant que son entrée en vigueur est encore trop récente. De plus, le temps de traitement des demandes de substitution (14 à 56 jours) dépasse le délai légal de 10 jours, trop court. Qu’attendre des récentes évolutions ? Saisi par l’association UFC-Que Choisir pour des motifs de rejets imprécis ou illégaux en septembre 2015, le superviseur n’a pour le moment pas réagi. Entretemps, la Fiche Standardisée d’Information (FSI) du CCSF a été imposée aux banques pour faciliter l’appréciation de l’équivalence des garanties, qui conditionne la délégation et la substitution d’assurance pour davantage de transparence. Le projet de loi Sapin laissait espérer une réelle évolution en étendant le droit à la résiliation à échéance annuelle de l’assurance de prêt immobilier (ce droit concernait déjà l’assurance habitat et auto/moto). Malheureusement, il ajoute une clause autorisant un « refus justifié » du banquier. Une faille dont ces derniers pourront user pour continuer à faire preuve de mauvaise volonté.