Ce 1er avril 2019, le taux d’usure, à savoir le taux maximum auquel un établissement bancaire peut faire crédit à ses clients, a encore diminué, entrainant une situation plus que tendue pour certains profils d’emprunteurs… Un règlement contre-productif Rappelons-le, lors de sa mise en place, le taux d’usure devait protéger les emprunteurs potentiels des abus. Il permettait de fixer la limite maximale des taux de crédits immobiliers, afin d’éviter aux établissements prêteurs de faire crédit à des taux indécents. Le taux d’usure correspond ainsi au Taux Annuel Effectif Global maximum, qui comprend le taux nominal, les garanties d’assurance, les frais de garantie et les frais de dossier. Aucune banque ne peut y déroger. Cependant, ce plafond est en baisse constante depuis plusieurs mois. Au 1er avril, le taux d’usure applicable en crédit immobilier a encore diminué, et a atteint sa valeur la plus basse. Pour les crédits inférieurs à 10 ans, le taux d’usure est de 2,73%. Il est de 2,77% entre 10 et 20 ans, ce qui constitue une diminution de 0,06%, et il est de 2,96% pour les crédits supérieurs à 20 ans, contre 3,01% le mois dernier. Les plus fragiles exclus Avec ces taux d’usure très bas, voire trop bas, certains profils d’emprunteurs se retrouvent face au mur. En effet, comme il comprend toutes les garanties et les assurances, le taux d’usure se retrouve vite atteint par des profils considérés comme à "risque. Pour emprunter, les plus fragiles parviennent très facilement à des taux qui dépassent les taux d’usure et ne peuvent donc emprunter. Les personnes les plus faibles, comme les seniors, les personnes plus à risque en assurance, celles qui bénéficient de prêts aidés, ou ceux qui empruntent des sommes faibles sur des durées plus courtes sont ainsi parfois purement et simplement exclus du prêt. Certaines banques refusent même de prêter pour des durées inférieures à 20 ans. Dans une conjoncture de taux de crédits immobiliers qui défient les pronostics, être exclu du prêt est une véritable moins-value. Il devient impossible de constituer son patrimoine, et de profiter de ces taux exceptionnels. Un calcul à revoir Face à cette exclusion des plus faibles, le taux d’usure devient contre-productif et se retourne même contre son utilité première. Les abus ne sont plus évités, bien au contraire. Il semble nécessaire de revoir le calcul du taux d’usure dans un contexte de taux bas, afin d’éviter la mise à l’écart des profils qui pourraient justement profiter de ces taux. En effet, le taux d’usure se base sur les taux moyens relevés les trois derniers mois. A ce taux moyen est ajoutée une marge de 30% pour se prémunir d’un risque de surévaluation. C’est cette marge qui pose problème dans la conjoncture actuelle. En effet, lorsque les taux de crédit immobilier sont autour de 3%, la marge permet au taux d’usure de jouer son rôle régulateur, mais avec des taux en-dessous de 1,50%, elle n’est plus suffisante. Il est temps de changer ce mode de calcul car dans le cas contraire, les seuls à ne pas profiter des taux extrêmement bas seront les plus faibles qui vont passer à côté de cet effet d’aubaine favorisant la constitution d’un patrimoine, dommage… C’est le cas typique d’une réglementation qui produit l’effet totalement inverse à celui initialement recherché. Maël Bernier, directrice de la communication de Meilleurtaux.com